jeudi 23 juin 2011

"Trois femmes puissantes".

Je connais ta façon d’acheter.
Ce qui t’entoure matériellement est chargé d’histoire , tes « choses » sont lestées des destinées qui les ont accompagnées, usées, parfois au bord de la ruine dans l’exagération de ton horreur du neuf .Divertissant de te suivre dans les salles des ventes, les brocantes, les vide-greniers et autres marchés aux puces, ton œil vif repère la robe au tissu soyeux « comme on n’en fait plus »,le métal satiné par l’usage ; le bois rare, la porcelaine si fine « à peine ébréchée ». … Il te faut toucher, soupeser, humer ; tous les sens en éveil tu ne résistes pas au coup de foudre.
Le dimanche matin je sais te trouver à la foire aux livres.
- Parle-moi du dernier livre que tu as déniché.
-Attirée par l’auteur à la qualité reconnue, son origine et le titre surprenant j’ai consacré deux malheureux euros à Marie NDiaye, « Trois femmes puissantes » Prix Goncourt 2009. J’imagine que depuis deux ans qu’il passe de main en main (féminine) il est virtuellement annoté, enrichi de l’expérience de lectrices attentives ; j’y ajoute la mienne avant de le remettre en circuit…
J’ai été immédiatement séduite par l’écriture de Marie DNiaye d’une délicatesse recherchée, aux phrases lentement déroulées comme le récit artistiquement complexe d’un griot africain.
Son style puissant, ignore les mièvreries et s’attaque de plein fouet aux réalités les plus sordides du destin de ses « héroïnes » .Ce qualificatif est en l’occurrence tout à fait déplacé ; en réalité ces trois femmes son apparemment des perdantes, perdues, éperdues …Le titre de l’ouvrage est justifié par la force de l’entêtement de Norah, Fanta, Khady Demba à préserver leur dignité, leur intégrité morale, leur identité intime. Cette force reste cachée et nul ne peut la deviner tant elle est inopérante à travers les drames qui les affectent .Le lien commun de leurs vie est une humiliation infligée, parfois à l’excès, par les hommes. En effet ce qui est frappant c’est que dédié à des femmes le récit parle en réalité , avant tout , des hommes , dans la majorité de ses pages d’une psychologie plus profonde que dans l’étude des caractères féminins. Ces hommes qui les accompagnent ou plutôt les abandonnent, les humilient, les torturent sont dans leur cruauté, au minimum dans leur veulerie les personnages principaux. Ceux qui importent, ceux qui font, ceux qui décident.
Les femmes sont refermées dans leur obstination, le maintien de leur fierté, cette « puissance » qui leur permet de survivre mais en aucun cas de lutter et de s’imposer. Il s’agit en réalité de trois femmes impuissantes à changer le cours de leur destin.
Allez la main passe !
Ce soir je dépoussière un vieil Hubert Reeves… qui, lui, va m’amener dans la poussière mais celle des étoiles.

7 commentaires:

  1. Bien intéressant d'avoir ce regard, j'ai laissé passé et le livre et le film, ils viendront tôt ou tard occupé mon champ de vision. Cette chronique m'en redonne l'envie.

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  2. Laure, merci de m'indiquer le film j'aimerais le voir.

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  3. @Manouche
    Pardon aucun film n'est sorti encore d'après ce livre, mais en revanche "White Material"
    de Claire Denis,sur un scénario signé par Marie NDiaye avec Isabelle Huppert;

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  4. les vraies femmes puissantes ont une belle tranquiLlité en elles .. et qui se voit sur leur visage .
    le bouquin ? je l'ai mais je ne l'ai pas encore ouvert . Alors, c'est dit, je l'emporte en vacances avec les John fante
    bizzz TZR

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  5. Chère TZR ou TZD (?) heureuses vacances et belles lectures, par contre ne pas lire "Angélica"si le moral n'est pas au beau fixe!Bizzzzzzzz

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  6. HU ! hu ! tu m'as bien fait rire ce matin avec tes remarques sur mon blog !
    voilà une action qu'elle est salutaire !
    bien sûr, c'est TZD , et vas donc savoir pouquoi je mets TZR (? ) mystère et boule de gomme !
    Bizzzzzz
    Tarzandany, of course ( pas en bout de course )

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